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Avis de Tempête

Concert de l' Orchestre National de France dirigé par Fabien Gabel, Auditorium de Radio France, 2020-2021

Avis de Tempête

Claire-Marie Caussin — 7 octobre 2020

Programme

Henri Duparc (1848-1933)
Aux étoiles
Piotr Ilyitch Tchaïkovski (1840-1893)
Concerto pour violon et orchestre en ré majeur, op.35
La Tempête, op.18

Daniel Lozakovich, violon
Orchestre National de France
Direction musicale : Fabien Gabel

Auditorium de Radio France
Radio France - Maison de la radio, Avenue du Président Kennedy, Paris, France
Fiche du lieu
Paris, Auditorium de Radio France, jeudi 1er octobre 2020, 20h

Après Gil Shaham à la Philharmonie le 30 septembre, c’est au tour du jeune violoniste Daniel Lozakovich d’interpréter le concerto pour violon de Tchaïkovski à l’auditorium de Radio France, accompagné de l’Orchestre National de France dirigé par Fabien Gabel. Le soliste y confirme de superbes qualités techniques et surtout musicales qui en font un des musiciens les plus intéressants de la nouvelle génération. L’orchestre interprète ensuite La Tempête – fantaisie symphonique inspirée de la pièce de Shakespeare – où il déploie un très beau son d’ensemble ainsi qu’une expressivité remarquable, grâce à la direction dense, narrative et pleine de contrastes de Fabien Gabel.

Fabien Gabel et Daniel Lozakovitch en répétition

C’est un programme Tchaïkovski passionnant qu’a dirigé à l’Auditorium de Radio France le chef Fabien Gabel, en proposant le célébrissime Concerto pour violon avec le jeune violoniste Daniel Lozakovich, puis La Tempête, fantaisie symphonique incroyablement évocatrice inspirée de Shakespeare.

Seule « entorse » à ce programme consacré au compositeur russe, Aux étoiles de Duparc, courte pièce rescapée de l’opéra inachevé La Roussalka. D’une durée de cinq minutes seulement, elle est remarquable par son emploi des violons, altos et violoncelles solo alors que l’orchestre autour d’eux se tait progressivement, avant de se déployer de nouveau en de longues phrases amples et mélancoliques. Fabien Gabel parvient à insuffler à l’Orchestre National de France une fluidité, une direction qui nourrissent la phrase et la dessinent, en assumant son caractère très intérieur et méditatif.

Daniel Lozakovitch

Le Concerto pour violon de Tchaïkovski est d’une autre trempe, et ce dès le crescendo d’introduction qui lance le solo. On sent ici l’orchestre acéré, intense dès les premières mesures, avec des cordes très marquées ; l’entrée du soliste n’en est que plus frappante lorsqu’émane du violon de Daniel Lozakovich un son clair, rempli d’harmoniques aiguës, extrêmement vibrant, parfois à peine frôlé par l’archet. Il y a de l’émotion pure et quelque chose de déchirant dans le jeu de ce jeune violoniste – dix-neuf ans ! – qui s’empare de ces pages virtuoses comme du chant le plus intime et spontané qui soit. Ajoutant à cela une multitude de nuances, ne laissant rien au hasard, il semble inspirer l’orchestre qui s’épanouit dans des tutti vibrants, denses, ou répond au soliste par touches. La cadence du premier mouvement est un moment suspendu, un tête à tête du violoniste avec son instrument où l’archet prend davantage de poids, où le jeu s’affirme mais sans jamais perdre son lyrisme.

De lyrisme, il en est question dans le deuxième mouvement, avec sa ligne mélodique qui semblerait excessivement simple dans une partition si dense et technique. Après une très belle introduction aux vents où l’on arrive à percevoir chaque timbre se déploie un thème mélancolique, où la voix soliste se mêle avec une belle homogénéité aux cordes de l’orchestre ; superbe contre chant à la clarinette également, si bien mis en valeur par la direction de Fabien Gabel et qui rappelle les couleurs d’Eugène Onéguine composé par Tchaïkovski quelques mois avant le concerto. Le surgissement du troisième mouvement, qui semble toujours aussi inattendu, donne l’occasion à Daniel Lozakovich de faire entendre un son plus dense, peut-être moins rayonnant mais doublé d’un jeu sec qui dirige la phrase et emmène l’orchestre avec lui. Ce dernier est tout en efficacité rythmique, avec des pizzicati crescendo/decrescendo et une agitation dansante qui accompagne et porte le soliste, et permet de clore l’œuvre dans une apothéose d’entrain et de couleurs.

Déjà très présent sur les scènes internationales et dans les festivals (Verbier, Gstaad, Festival de Pâques), repéré par Vladimir Spivakov puis Valery Gergiev avec qui il vient d’enregistrer le Concerto pour violon de Beethoven pour Deutsche Grammophon, Daniel Lozakovich prouve une fois encore des qualités techniques et d’interprétation annonçant qu’il faudra compter avec lui à l’avenir, et que l’expérience n’est pas indispensable lorsqu’on a la sensibilité et la musicalité nécessaires pour aborder un répertoire aussi exigeant. Confirmation pour ceux qui l’avaient déjà entendu, belle surprise sans doute pour ceux qui le découvraient, on sort assez frappée par la simplicité et l’intensité avec lesquelles le violoniste s’exprime, et l’émotion palpable qui ressortait de son jeu – émotion que les studios d’enregistrement ne peuvent pas rendre. C’est sans doute cette capacité à faire parler l’instrument qui pourra le distinguer au sein de la nouvelle génération de musiciens qui émerge actuellement, et Daniel Lozakovich a indubitablement les qualités nécessaires pour s’y imposer.

Fabien Gabel en répétition

Difficile de poursuivre le programme de la soirée après ce temps fort ; et pourtant c’est une seconde tempête qui s’abat sur l’auditorium de Radio France à l’écoute de la fantaisie symphonique composée par Tchaïkovski à partir de La Tempête de Shakespeare. On ne s’étonne plus qu’un compositeur romantique s’empare de l’œuvre du dramaturge – Tchaïkovski s’y était d’ailleurs déjà essayé dans Roméo et Juliette ; mais cette pièce reste l’une des plus évocatrices et des plus dramatisées, joignant l’expressivité à la mise en valeur de l’orchestre. Fabien Gabel en livre de plus une superbe lecture, lisible, pleine de contrastes et laissant rayonner l’orchestre.

C’est d’abord une évocation de la mer, qui rappelle le prélude de L’Or du Rhin avec ce mouvement cyclique des cordes puis l’apparition du thème qui organise le chaos et semble construire tout un monde. La mer s’agite et menace, mais ces premières pages s’achèvent sur un accord majeur rayonnant, où l’Orchestre National de France fait entendre des cuivres somptueux. Le récit de l’amour de Miranda et Fernando n’en est que plus délicat, les violoncelles faisant chanter le thème avec la densité et le lyrisme attendus. Mais au-delà de ces pupitres qui s’expriment individuellement, c’est un très beau son d’ensemble qui se fait entendre, plein, brillant, remarquablement mené par le chef notamment dans le largamentissimo qui atteint des sommets de romantisme, avant de faire entendre une fanfare de cuivres évoquant Prospero renonçant à ses pouvoirs et quittant l’île. Le retour au premier thème de l’œuvre clôt La Tempête sur elle-même, en fait une forme autonome et cohérente, achève un récit qui n’a pas eu besoin de mots pour raconter son histoire. C’est précisément cet arc narratif que Fabien Gabel a su traiter et exploiter pour rendre l’orchestre si expressif, et achever cette soirée « presque tout Tchaïkovski » avec on ne peut plus d’éclat.

Moment de répétition avec le National

Crédits photo : © Christophe Abramovitz / Radio France

Cet article a été écrit par Claire-Marie Caussin

Daniel LozakovichFabien GabelOrchestre National de France

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